Un Caféministe ?

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Article #59 – Auteures : Janelle & Manon

Cette semaine, Janelle et Manon, stagiaires pour la communication du Cocon, nous racontent leur histoire ainsi que leur rapport au féminisme. Vous aussi, décrivez votre lien au féminisme, et envoyez-nous vos textes pour apparaître dans le blog !

Ce matin-là, Manon et Janelle décidèrent de se retrouver au café. Cette idée naquit d’une envie commune : décompresser ensemble avant leur premier jour de stage. Lorsque Manon regarda sa montre, il était 8h10. Elle avait cinq minutes d’avance. Elle décida quand même d’entrer dans le café. Un rapide coup d’œil circulaire lui permit de trouver Janelle, sur son téléphone, dans le fond de la salle. Quand elle s’approcha de cette dernière, elle sourit et la salua : 

  • Salut Manon !
  • Salut Janelle ! Comment vas-tu ? Prête pour cette nouvelle aventure au Cocon Solidaire ?

Janelle grimaça. 

  • Bah écoute, j’ai quelques appréhensions ! 
  • Ne t’inquiète pas, je suis sûre que tout va très bien se passer !

En effet, Manon était optimiste. Pourquoi ce stage se déroulerait-il mal ? Stresser ne les mènerait à rien, il valait mieux se détendre. Elle reprit : 

  • Tu n’as pas à t’en faire ! L’association est top et défend des valeurs communes aux nôtres. Ça ne peut être que positif !

Janelle hocha la tête.

  • Tu as raison et si tu veux mon avis, c’est vraiment un plus que notre première expérience en entreprise reflète ce à quoi nous aspirons !  Je suis en effet particulièrement sensible à la cause féministe et à l’égalité homme-femme… Janelle prit une gorgée de café et reprit la parole, pressée de connaître les aspirations de son binôme. Chacun à une histoire différente avec les causes qui lui tiennent à cœur. Je suis curieuse de connaître ta perception des choses !

 

Manon se redressa sur le fauteuil en cuir pour être plus à l’aise.

 

  • Je suis sensible à cette cause tout comme toi. Je suis féministe, même si cela est un terme plutôt large et que désormais cela veut tout et rien dire… Il y a tant de courants et de dérivés qu’il faudrait davantage les spécifier.
  • Je suis totalement d’accord ! Elle s’exclama un peu fort et quelques paires d’yeux se tournèrent vers les jeunes filles. Quand elle s’en rendit compte, elle reprit sur un ton plus calme : Mais d’ailleurs, connais-tu la différence entre ces courants ? Je t’avoue que j’aimerais y voir plus clair pour pouvoir me situer dans l’un d’eux… Comme beaucoup, je pense que nous sommes révoltées par toutes les discriminations qui persistent aujourd’hui, mais je n’avais encore jamais pensé à définir mon féminisme !

 

Manon s’était grattée la tête espérant rassembler ses connaissances lointaines sur le sujet.

  • Il y a trois grands courants : le féminisme libéral, le féminisme radical et le féminisme essentialiste. Je ne suis pas très calée là-dessus mais pour te la faire courte, le féminisme libéral c’est vouloir installer le libéralisme politique aux rapports hommes-femmes, c’est-à-dire l’égalité des droits par exemple. Il ne va pas du tout remettre en question le patriarcat contrairement au féminisme radical. Ce dernier va affirmer que les hommes sont à la racine de l’oprimation de la femme. Quant au féminisme essentialiste, il admet que les femmes et les hommes sont physiologiquement différents mais se bat pour leur égalité.

 

Janelle l’avait écoutée attentivement. Elle pensait désormais être capable de faire la différence entre les courants. Mais des recherches complémentaires ne seraient pas de refus !

 

  • Ok j’y vois plus clair ! Même si les idées et les modes d’actions divergent, le combat reste le même. C’est donc important que nous restions toutes et tous unis malgré la différence des courants.
  • Exactement ! Nous sommes toutes en faveur de l’émancipation de la femme au sein de la société. Alors pourquoi ne pas se serrer les coudes ? 

Il était évident que la situation était beaucoup plus complexe que ça. Certains détails leur échappaient, elles en étaient bien conscientes. Mais elles étaient heureuses de partager la même opinion. 

Janelle changea de sujet : 

  • Quand je pense à toute la pression que la femme a subi durant des années : devoir être belle, être douce, être à l’écoute et aux petits soins de son mari, etc. Mais également à celle qui s’est développée en parallèle chez l’homme : être viril, travailler tout le temps et être protecteur. C’est de là que vient ce rapport de subordination, que nous essayons d’éradiquer tant bien que mal.
  • C’est malheureusement vrai. Les rôles sociaux de “femme-objet” et de “mère au foyer” se sont ancrés dans la tête de plusieurs générations. Aujourd’hui, on peut encore entendre des hommes clamer « la place de la femme c’est à la cuisine », comme si elle ne s’était jamais émancipée ! 

Manon secoua la tête. Elle avait l’impression que la route allait encore être longue avant que les femmes se fassent respecter. Cela la décourageait.

  • Tu n’as pas tort. Mais tu ne trouves pas qu’il y a eu quand même de nombreuses évolutions ces dernières années ?  Comme le body positivisme.

Evoquer le bodypositivisme redonna le sourire à la jeune femme.

  • Ce hashtag a en effet émergé sur les réseaux sociaux pour mettre en lumière la beauté de tous les corps malgré nos différences. Nous méritons toutes de nous aimer et d’être aimé ! Ce mouvement vient panser les blessures de la femme, qui a longtemps souffert de critères de beauté pour être considérée comme “belle”…

Quelques minutes s’écoulèrent durant lesquelles elles se replongèrent dans l’histoire. Elles visualisèrent les différentes luttes des femmes comme celle pour l’IVG ou le droit de vote. “Nous sommes les révolutionnaires des temps modernes”. Cette conviction s’installa doucement dans leurs esprits.

Janelle se racla la gorge pour briser le silence. 

  • Hum, tu sais, je me considère comme quelqu’un de chanceux. Petite, j’ai évolué dans un environnement où je ne me suis jamais vraiment retrouvée face à des situations sexistes ou discriminatoires. Je savais pourtant qu’elles existaient. En grandissant, j’ai compris que la jeune génération avait un rôle essentiel dans l’évolution des mentalités. C’est pour cela qu’intégrer une association était l’opportunité de consacrer le temps dont je disposais à une cause noble. J’imagine que c’est pareil pour toi !
  • Tout comme toi, j’ai eu la chance de grandir dans un cadre “safe”. J’assume ouvertement être une jeune femme privilégiée. Je n’ai pas grandi dans des banlieues difficiles, je suis allée à l’école et je n’ai pas souffert de problèmes d’argent. C’est donc à l’adolescence que la réalité m’est tombée dessus. Je me suis informée et sensibilisée à différentes causes dont le féminisme. Elle reprit sa respiration et poursuivit. Lorsque j’ai entendu parler du Cocon, son concept novateur m’a tout de suite interpellée. “Réenchanter la vie des femmes en leur permettant de s’émanciper avec des sorties”, voilà un objectif qui m’avait conquise. En effet, je me suis moi-même coupée de tout le monde pendant deux ans. Il est évident que si le Cocon avait été là, j’aurais pu éviter toutes ces années de solitude !

 

Manon s’était surprise d’aborder quelque chose d’aussi personnel. Mais elle se sentait à l’aise et avait confiance en Janelle. Elle savait qu’elle ne la jugerait pas.

 

  • C’est possible ! Le Cocon a aidé tellement de femmes. Il aurait pu t’apporter le soutien dont tu avais besoin.

                      

Janelle regarda subitement sa montre. 8h49. Elle n’avait pas vu le temps passer. Petit à petit, elle se souvint de ce qui l’attendait d’ici quelques minutes. Cependant, elle n’était plus inquiète. Cette conversation l’avait détendue et elle était fin prête à se consacrer pendant huit semaines au stage avec Manon. Cette dernière comprit qu’il était l’heure de se diriger vers la sortie. Elles payèrent l’addition puis marchèrent en direction du Britannia.

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